Célébrer, jusqu’au bout

Chapelle, Maison médicale Jeanne Garnier, Paris XV

Ce soir j’ose un sujet sérieux, important, essentiel. Sinon crucial. Sans doute pour oser une communion de pensées. Sinon de prières.

Depuis quelques jours, ce sont des heures singulières que je vis. 

Des minutes. Une dizaine. Guère plus. Unique, précieuse, ultime, auprès d’une amie qui m’est chère : le partage de ses dernières heures de vie, dans une unité de soins palliatifs que je parcours pour la seconde fois.

Loin des derniers propos, débats, images médiatiques sur la fin de vie et l’acharnement thérapeutique, je découvre un lieu, non, un nid, un cœur aux mille couleurs, attentionné et doux, en plein Paris, où il fait beau et bon, oui, j’ose les mots : où il fait beau et bon mourir. Paisiblement. Au possible. Au mieux.

En dépit de la douleur.

Une structure incroyable (à développer !) où l’on peut même installer votre lit dans le jardin, à l’ombre d’un arbre, voire sous le couvert de la chapelle ! Samedi, là, j’ai même  osé imaginer mon propre mourir.

Mais, ce soir, il reste encore des heures à vivre, à ressentir, à respirer, même petitement, tout petitement, pour mon amie et son mari. Quelques heures pour oser, allez, osons encore un grand mot : pour oser célébrer la vie, une vie qui bat, encore et encore, jusqu’à son bout

« Et pourtant il nous reste encore à célébrer …

Célébrer ta beauté de ce soir.

Célébrer ton histoire, jamais racontée.

Célébrer ton angoisse, la mienne.

Quand tout est dit. Il reste encore à célébrer l’arrivée de la nuit.

Célébrer les bruits du couloir.

Célébrer le va-et-vient des infirmières.

Célébrer les éclats de rire dans la chambre à côté, et les plaintes et les respirations difficiles, et les échos, plus loin, d’un feuilleton télévisé.

Célébrer (tes) derniers moments (…).

Célébrer la confiance. Essayer du moins. (…).

Célébrer n’est pas réservé.

Célébrer n’est pas croyant ou non croyant.

Célébrer n’est pas religieux. Et même quand c’est religieux, il reste encore à célébrer pour donner à l’humanité plus d’humanité. »

Gabriel Ringlet


A Florence & Jean-Paul

A propos Delphine Dhombres

Née en 1975. Oblate bénédictine, bénévole d'accompagnement Petits Frères des Pauvres à la prison de Fresnes, catéchiste, coordinatrice du Dialogue interreligieux (paroisse Saint-François de Sales, Paris XVII) & professeur de Lettres modernes en banlieue parisienne (92).
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